Taxe Reynders et ETC sur l’or et l’argent en Belgique : ce qu'il faut savoir
Découvrez comment la taxe Reynders s’applique réellement aux ETC sur l’or et l’argent en Belgique, pourquoi elle surprend tant d’investisseurs, et comment éviter les mauvaises surprises fiscales.
En Belgique, de plus en plus d’investisseurs s’intéressent à l’or et à l’argent, non seulement comme valeur refuge, mais aussi comme alternative à la Bourse classique. Beaucoup choisissent les ETC (Exchange Traded Commodities), des produits cotés en Bourse censés répliquer le prix du métal physique. Mais un détail souvent ignoré peut venir gâcher la fête : la taxe Reynders.
Cette taxe, pensée à l’origine pour les fonds obligataires, s’applique parfois même à certains produits adossés à de l’or ou de l’argent. Autrement dit, vous payez un impôt sur un produit numérique que vous pensiez totalement lié à un simple lingot d'or ou d'argent physique.
Comprendre la logique de la taxe Reynders
La taxe Reynders est une retenue fiscale belge prélevée sur les plus-values réalisées lors de la vente, du rachat ou du remboursement de parts de fonds d’investissement.
Concrètement :
- Elle s’élève à 30 %.
- Elle s’applique sur la part de la plus-value liée à des titres de créance (obligations, instruments monétaires, etc.).
- Les intermédiaires belges (courtiers ou banques) doivent en théorie la prélever automatiquement.
À l’origine, l’idée était simple : éviter que les revenus obligataires passent entre les mailles du filet fiscal en étant “dilués” dans des fonds d’investissement, ETF et autres ETC. Mais cette logique entraîne aujourd’hui des effets collatéraux. Certains produits, qui n’ont rien d’une obligation aux yeux d’un investisseur, se retrouvent pourtant fiscalement assimilés à une créance.
Pourquoi des ETC “adossés à de l’or physique” peuvent-ils être taxés ?
C’est là que les choses se compliquent. Quand vous achetez un ETC d'or “physique”, vous pensez logiquement détenir une fraction d’un lingot stocké dans un coffre à Londres ou à Zurich. Mais en réalité, ce n’est pas toujours le cas juridiquement parlant.
La plupart des ETC sont émis sous forme d’obligations par une société spécialement créée pour cela (par exemple DB ETC plc pour les produits Xtrackers). L’investisseur ne détient donc pas directement le métal, mais une créance sur l’émetteur.
Même si cette dette est garantie par du métal physique, elle reste une dette. Et pour l’administration fiscale belge, cela suffit à rendre le produit taxable au titre de la taxe Reynders.
En clair, le marketing “adossé à de l’or physique” ne suffit pas à échapper à l’impôt si la structure juridique reste celle d’un titre obligataire.
Des exceptions négociées avec le fisc belge ?
Certains émetteurs ont tenté de faire reconnaître leurs ETC comme équivalents, sur le plan économique, à une détention directe de métal précieux. Ils ont donc sollicité des accords administratifs auprès du fisc belge.
L’objectif : obtenir une exonération de taxe Reynders.
Mais dans la pratique :
- Il n’existe pas de registre public recensant les émetteurs bénéficiant d’un tel traitement.
- Certains accords individuels peuvent exister, mais ils sont confidentiels.
- Pour un investisseur particulier, il est impossible de s’y fier sans preuve écrite.
Moralité : si votre courtier ou votre émetteur ne confirme pas noir sur blanc l’exonération, partez du principe que la taxe s’applique.
Les principaux émetteurs d’ETC or et argent : ce qu’il faut savoir
Le marché européen des ETC est dominé par quelques grands noms, souvent adossés à des banques ou sociétés de gestion bien connues. Tous n’ont pas la même transparence fiscale vis-à-vis de la Belgique.
- Xtrackers (DWS / DB ETC plc) : structure obligataire sécurisée par des lingots. Aucune publication officielle d’exonération belge connue à ce jour.
- WisdomTree : large gamme d’ETC métaux précieux. Les prospectus confirment la forme obligataire. Pas d’accord fiscal belge public identifié.
- HANetf / The Royal Mint : produit intéressant, car adossé à l’or de la Royal Mint britannique. Malgré une documentation très claire sur le stockage, aucune mention d’accord fiscal belge.
- iShares (BlackRock) : propose plusieurs ETC or physiques en Europe. La structure est également celle d’un titre de créance. En théorie, BlackRock a signé un accord et ses ETC adossés à l'or et l'argent ne seraient donc pas taxés. Vérifiez par vous-même car cela reste une information à prendre avec des pincettes. J'ai écrit à BlackRock sur ce sujet il y a quelques semaines mais je n'ai reçu aucune réponse.
- VanEck : même constat. Les ETC or et argent sont émis sous forme obligataire. Aucun accord public publié.
Plutôt que de répéter “aucune info précise” pour chaque acteur, retenez l’essentiel : aucun grand émetteur, sauf peut-être BlackRock (iShares), n’a communiqué publiquement d’accord fiscal avec la Belgique.
Si une exception existait, elle serait mentionnée noir sur blanc dans la documentation officielle du produit - ce qui n’est actuellement pas le cas.
Faut-il interroger son courtier ?
Oui. Votre courtier belge (ou agréé en Belgique) est celui qui, en pratique, applique la taxe Reynders lors d’une vente ou d’un rachat.
Les plateformes accessibles aux investisseurs belges sont assez nombreuses : Trade Republic, Saxo Bank, LYNX, Interactive Brokers, DEGIRO, Keytrade Bank, Re=Bel, Bolero, BUX, Easybroker, eToro, ING Self Invest, MeDirect, MEXEM, Revolut, Trading 212, etc.
Dans la réalité, très peu d’entre elles publient une liste claire des produits concernés.
L’expérience de nombreux investisseurs montre que les réponses obtenues varient fortement selon l’interlocuteur. Un lecteur me confiait récemment qu’après avoir posé la même question à trois courtiers, il avait reçu trois réponses différentes :
- L’un affirmait que la taxe s’appliquait “toujours”,
- Un autre parlait d’une “exemption partielle”,
- Le troisième… n’en avait tout simplement jamais entendu parler.
C’est dire à quel point le flou règne encore.
Or et argent physiques : un cadre fiscal plus clair
Face à cette incertitude, beaucoup se tournent vers l’achat de métal physique (lingots, pièces, etc.).
Au niveau des taxes, la différence est majeure :
- Si vous achetez et revendez du métal physique dans le cadre de la gestion normale de votre patrimoine privé, la plus-value n’est pas imposable.
- La taxe Reynders ne s’applique pas, car il ne s’agit pas d’un produit financier.
Cela ne veut pas dire que le métal physique est parfait : il faut le stocker, l’assurer, et les frais de transaction sont souvent plus élevés. Et n'oubliez pas que vous pouvez vous le faire voler si vous le conservez chez vous. Mais du point de vue fiscal, il reste plus simple et plus prévisible qu’un ETC.
Que faire si vous détenez déjà des ETC or ou argent ?
Voici les étapes à suivre pour éviter les mauvaises surprises fiscales :
- Consultez le prospectus du produit pour identifier sa structure juridique (obligation, créance, certificat, etc.).
- Contactez votre courtier et demandez une confirmation écrite sur l’application ou non de la taxe Reynders.
- Conservez toute la documentation reçue (prospectus, e-mails, fiches produits). Cela pourra servir de preuve de bonne foi en cas de litige.
- Comparez avec l’achat physique : si votre objectif est patrimonial ou de long terme, acheter directement du métal peut être plus avantageux.
En résumé
La taxe Reynders est souvent un impôt caché dans le monde des produits financiers. Même si les ETC or et argent se présentent comme des instruments “physiques”, leur nature juridique en tant que titres de créance les rend vulnérables à cette fiscalité.
Aucun émetteur n’a, à ce jour, publié d’accord d’exonération spécifique en Belgique. Votre seule protection reste donc la vérification individuelle et la documentation écrite.
L’achat de métal physique reste, lui, plus lisible fiscalement, mais moins pratique à gérer. Avant de choisir, pesez les avantages : simplicité contre liquidité, sécurité fiscale contre facilité d’accès.
Dans tous les cas, ne partez jamais du principe qu’un ETC “physique” est automatiquement exonéré de taxe Reynders. Vérifiez, c’est la meilleure protection pour vos placements.
Les informations contenues dans cette analyse ne sont pas des conseils d'achat. Par conséquent, l’auteur ne pourra être tenu responsable en cas de pertes sur le(s) produit(s) concerné(s). Tout investissement comporte des risques de pertes. Pour plus d’infos, voyez nos mentions légales.
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